dimanche 17 janvier 2016

[Critique] Elantris - Brandon Sanderson

Lecteur, mon cher camarade, toujours là (enfin, je l’espère) pour lire mes avis divers et variés sur les livres qui me passent sous les doigts, aujourd'hui je pense à toi. Pas de science-fiction. Si si, tu lis bien. Je vais traiter d'un autre type de livre ; de vrai de vrai. Un livre de quoi ? Un roman fantastique, bien sûr. Qui est aussi très bien, selon mon avis de référence, à savoir moi-même. Comme quoi certains genres portent bien leurs noms.

Bref, je te fais confiance, lecteur, pour reconnaitre le nom de l'auteur dans le titre de l'article. Hein ? Cela ne te dis rien ? Bon, on va dire que je ne te l'ai jamais dit, mais jette un œil à mon article sur "La Roue Du Temps". Ah, tu vois bien que tu connais déjà Brandon Sanderson ! Je suis fier de toi, lecteur, sache-le. Alors, qu'est-ce qu'Elantris pour l'auteur ? Rien de moins que son premier roman publié. C'est le roman qui lui a fait mettre les pieds sur le devant de la scène, c'est son premier contact avec le public ; c'est son premier contact avec moi. Et je dois bien avouer qu'il ne m'a pas déplu. 

Pourtant, cela ne commence pas vraiment bien : Brandy (oui, nous l'appellerons Brandy. Je fais ce que je veux d'abord.) a la tendance, que je trouve peu appréciable, de nous matraquer de termes inconnus. Quand c'est bien fait (et là, hum, ce n'est pas vraiment le cas.) on se sent intégré à l'histoire, on a l'impression de voir un monde étranger et de suivre la vie des personnages. Ici, non, je me sens juste paumé. Surtout que j'ai relu, une fois de plus, ce roman afin de faire la lecture a votre Sainte Déesse, ma compagne bien entendue. Et oui lecteur, je vais essayer de te convertir à mes dieux : Asimov et Jean-Jesus (oui, c'est vraiment le pseudonyme de ma compagne sur le net. Désolé.). Toujours est-il que ma relecture a mis au jour que mes goûts littéraires ont en partie changés. Je suis plus tatillon, pour tout dire. Et j'ai beau, moi, connaitre les termes inventés se trouvant dans le livre (les titres, les nations, etc...) je ne peux m’empêcher de penser à quelqu'un ne les connaissant pas. Et j'en ai un parfait exemple : ma compagne, à qui j'en fais la lecture. Les premiers chapitres ont été très confus, elle ne cessait de me redemander ce que signifie tel ou tel terme, qui est ce personnage, etc... Pour la défense de l'auteur, je note tout de même qu'il ne se contente pas de poser un pavé pour donner les définitions des différents mots. Vous savez, cette manie détestable utilisée dans des animés par exemple, où un personnage rencontre son meilleur ami et nous donne son CV complet.

Bon, là-dessus il faut tout de même avouer qu'il finit par nous donner gentiment ce qui nous manque afin de comprendre la signification de ces termes quelques pages après l'introduction de ceux-ci. C'est gentil. Nécessaire aussi il parait. Bref. Mais ce n'est pas le seul défaut de ce premier roman : les stéréotypes. Et oui, toute la narration se fait autour de trois personnages, mais j'y reviendrais plus tard, et ces trois personnages sont ... des stéréotypes. Et c'est un défaut immense. Heureusement, Brandy est un bon auteur, et son livre à de nombreux avantages pour contrer tous ces éléments négatifs. Certes, ces personnages sont clairs comme de l'eau de roche; mais ils évoluent. Faut pas croire, mais c'est mine de rien assez rare que des personnages évoluent, et en bien. Je veux dire, à part dans des livres où il y a un chemin initiatique (et ils ne sont pas si nombreux que ça, en dehors de l'heroic-fantasy), le personnage de fin est assez semblable au personnage du début. Et là, clairement avec le personnage du prêtre, ce n'est pas du tout le cas. D'ailleurs je noterais au passage que c'est le personnage que je préfère.

Un autre des points forts d'Elantris, c'est la structure de la narration : trois chapitres qui s'alternent, chacun montrant l'histoire selon le point de vue d'un des trois personnages principales. Cette forme cyclique permet de donner un certain rythme d'une part, mais également de donner à une même situation différents points de vue, totalement différents voir en opposition. Car, en effet, les trois personnages sont un prince, Raoden, une princesse, Sarene, et un haut prêtre, Hrathen; ces trois personnages passent la majeure partie du récit à s'opposer entre eux. En effet, à la base Raoden et Sarene sont fiancés sauf que le jour de l'arrivé de Sarene dans le pays du prince, celui-ci est annoncé mort ; son contrat de mariage, servant d'alliance entre les deux royaumes, stipule qu'en cas de mort du fiancé la princesse doit rester dans le royaume afin de garantir l'alliance. Elle décide d'en profiter pour remettre un peu d'ordre dans le royaume car c'est le bordel suite au nouveau gouvernement mis en place il y a dix ans. De son côté, Raoden n'est pas mort : surprise mother-fucker ! Enfin, il n'est pas mort ... complètement.

Le nom du livre, Elantris, provient d'une cité homonyme, dont les habitants sont considérés par les autres peuples comme des demi-dieux/dieux et qui gouvernaient le pays dans lequel la cité se trouve. Après tout, les elantriens possèdent une magie contrôlée par les Aons, une série de symbole servant également d'alphabet ; leur durée de vie est bien plus longue, ils ont une peau argentée/blanche, tout comme leurs cheveux. Or les elantriens sont d'anciens hommes et femmes tout à fait normaux ayant subi le Shaod, une transformation prenant aux hasards les habitants du royaume où se trouve la cité. Dix ans avant le début du récit à eut lieu le Reod, un cataclysme ayant transformé ces demi-dieux en créatures noirâtres, maladives, maudites ; le Shaod continue à faire son œuvre mais ne transforme plus les habitants en elantriens mais en ces âmes damnées. Le royaume les boucles tous dans la cité d'Elantris ; je te le donne en mille, ami lecteur, qu'arrive-t-il au prince dont je te parlais tout à l'heure ? Bim, un petit Shaod des familles dans les dents ! Du coup, officiellement il est mort, mais en vrai vit exilé dans la cité ; nous l'y verrons tenter de redonner forme à une société, les elantriens devenant fous : ils n'ont en effet aucune nourriture si ce n'est un panier d'offrande à chaque nouvel arrivant (étant considéré comme mort, les nouveaux elantriens ont droit au même rituel que les personnes véritablement mortes) et ils subissent éternellement (puisqu'ils ne peuvent mourir que de très peu de choses, en prenant en compte qu'ils ne sont plus soumis au vieillissement depuis le Reod.) chaque douleur subie (aucunes de leurs blessures ne peut en effet guérir). Bref, ce n'est pas la joie.

La-dessus, Hrathen, un prêtre assez haut gradé dans sa religion, est chargé de convertir ce pays. Dans l'idée, il prépare le terrain à la conquête car sa religion a en effet pour centre un peuple spécifique et celui-ci se sert de cette religion pour étendre son emprise sur les autres royaumes et peuples. Il est bien sûr en opposition à Sarene, puisqu'il veut soumettre le pays à la domination de son empereur, mais également à Raoden puisqu'il veut se débarrasser des elantriens qui sont pour lui une hérésie, un blasphème. Sarene s'oppose donc bien sûr à Hrathen mais aussi à Raoden qu'elle prend, ne sachant pas qui il est, un tyran contrôlant tout Elantris ; seul Raoden ne s'oppose à personne si ce n'est à la bêtise et à la violence. Jusqu'à la fin son seul but sera de sauver les elantriens, de comprendre comment Elantris a chuté, de résoudre le mystère de Reod. Bien que son personnage soit un des plus sages, si ce n'est le plus sage, il ne connait pas d’évolution : du début à la fin il est l’archétype du prince qui règne par l'amour, soutenu par ses sujets car il donne tout ce qu'il a, en biens matériels comme immatériels, pour leur bien-être. Il est doué, intelligent, beau, courageux et j'en passe : bref, le prince parfait.

Sarene, elle, est la femme indépendante, qui n'est pas superficielle, mais qui a peur au fond d'elle de l'image qu'elle renvoie aux autres. Elle n'aura de cesse de se demander si les gens l'aiment, de se répondre que non, ils l'admirent mais ne l'aiment pas, qu'elle est trop intelligente, etc... Et bien sûr, elle est intelligente, forte, douée, c'est une diplomate hors pair et même quand elle fait une bourde cela se solde généralement à son avantage. Et elle sera toujours comme ça à la fin. Seul Hrathen évolue vraiment, et c'est à mon sens lui qui donne tout l’intérêt aux relations des personnages : dès le début, on apprend qu'il vient d'un pays voisin, où il a provoqué une guerre civile afin de donner le contrôle à sa religion et son peuple, il en éprouve des regrets à cause des morts, mais trouve tout de même justifiée son action ; il est tout à fait prêt à recommencer dans ce pays si c'est nécessaire à sa conversion. Il n'est pas, contrairement à d'autres membres de son clergé, un fanatique, bien au contraire il place son intelligence et une réflexion minutieuse avant tout. Au court du livre, il se rendra peu à peu compte qu'il a perdu sa foi, et que son œuvre est tout sauf bonne ; la moitié du récit, voir les trois quarts en vérité, on le voit agir pour renverser ce pays et pourtant, à la fin, il trahira pour sauver Elantris, son pays et le pays de Sarene. Son évolution sera subtile, mais progressera tout au long du récit.

Brandy est un très bon auteur, et ce premier roman, bien que souffrant de certaines erreurs, restent un bon roman selon moi. Certes, il y a des stéréotypes, l'avalanche de nouveaux termes peut perdre son lecteur mais Sanderson fais partie de ces auteurs qui créent tout un univers autour de son histoire ; les termes sont nombreux mais finissent par être expliqués et rendent bien plus cohérent l'univers qui nous est décri que s'il avait utilisé des mots lambdas, pré-existants. De plus, à côté de cela son écriture est assez belle, l’évolution de certains personnages est vraiment bien traitée et l'histoire reste prenante même si en réfléchissant un minimum on voit transparaitre la réponse au mystère du Reod bien avant Raoden (je l'ai personnellement découvert à la moitié du livre environ). Le final de l'histoire est juste purement badass, avec feu d'artifice de magie très appréciable après en avoir entendu parler tout au long du récit sans la voir ou presque (le Reod ayant mis fin à la magie).

En bref, je vous le recommande ;  pas chaudement comme un livre d'Asimov, mais je le recommande tout de même. Après, gardez juste en tête que dans tout cela le plus important c'est bien entendu d'avoir un livre au coin de l'écran !

Rédigé par Mortak.

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